Ebola : comment l'épidémie s'étend

on samedi, 28 juin 2014.

Ebola : comment l'épidémie s'étend
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
En deux semaines, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le nombre de décès de fièvre hémorragique en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia est passé de 208 à 337 morts sur 528 cas confirmés. La Guinée, où est apparue l’épidémie, est le pays le plus affecté avec 264 décès confirmés. Pour Marie-Christine Ferir, la coordinatrice des programmes d’urgence de Médecins Sans Frontières (MSF), la clé est dans l’implication des populations concernées.
Comment expliquez-vous cette forte augmentation du nombre de cas de fièvre Ebola en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia ?
En deux semaines, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le nombre de décès de fièvre hémorragique en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia est passé de 208 à 337 morts sur 528 cas confirmés. La Guinée, où est apparue l’épidémie, est le pays le plus affecté avec 264 décès confirmés. Pour Marie-Christine Ferir, la coordinatrice des programmes d’urgence de Médecins Sans Frontières (MSF), la clé est dans l’implication des populations concernées.
Comment expliquez-vous cette forte augmentation du nombre de cas de fièvre Ebola en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia ?
 
Marie-Christine Ferir : Il y a quelques semaines, les cas d’Ebola commençaient à diminuer, mais là nous nous retrouvons face à une recrudescence de l’épidémie due à deux facteurs.
 
Tout d’abord, les gens sont très mobiles, ils passent les frontières, mais aussi ils cachent des malades et ne déclarent pas toujours les cas suspects, ce qui crée des risques de contamination. Les gens viennent parfois s’occuper de personnes infectées avant de repartir dans leurs villages respectifs, ce qui provoque l’apparition de nouveaux foyers.
 
Le deuxième facteur de contamination est lié aux funérailles. Lors des funérailles de cas suspects ou confirmés, il est important de laver le corps avec certaines protections, car il y a à ce moment un grand risque de contamination. Il y a encore malheureusement beaucoup de décès dans les communautés, car les funérailles ne sont pas faites avec les protections nécessaires. De plus, des gens viennent de différents endroits pour assister aux cérémonies, puis retournent dans leur village en étant parfois contaminés sans le savoir, car les symptômes se développent entre deux et vingt-et-un jours après le contact. 
 
Les pays voisins de la Guinée s'inquiètent de l'épidémie du virus Ébola qui frappe la région. À Conakry, la capitale guinéenne, 95 cas avérés de cette fièvre hémorragique ont été recensés depuis le début de l'année ici, mais aussi au Liberia et au Sierra Leone. 67 personnes ont succombé. La population est en alerte. L'épidémie s'est déclarée dans des régions du sud de la Guinée proches des frontières avec la Côte d'Ivoire, le Liberia et la Sierra Leone. Un cas suspect avait été enregistré lundi au Canada, mais l'homme - qui revenait d'un voyage en Afrique - n'est pas contaminé. L'infection intervient notamment après manipulation ou consommation d'animaux morts ou infectés dans la forêt tropicale.
 
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Est-ce que les acteurs étatiques ou non gouvernementaux ont les moyens de faire face à cette épidémie ?
 
Pour nous, le problème n’est pas le nombre de cas, mais la dispersion des foyers. Cela complique très fortement la réponse à l’épidémie, puisqu’il faut construire de nouveaux centres de prise en charge, plus de personnels et disperser les équipes dans davantage de lieux. Les acteurs étatiques ou non ont donc du mal à répondre au problème. Pour MSF, nous avons atteint nos limites. Faute de ressources humaines suffisantes, nous ne pouvons plus aujourd’hui nous déployer sur de nouveaux foyers comme nous le demandent les autorités.
 
La réponse des trois États concernés vous paraît-elle à la hauteur du problème ?
 
Il faut rappeler que c’est une pathologie nouvelle pour cette région. Il n’est pas évident pour les États ou pour les ONG sur place de s’adapter très vite à cette situation. Beaucoup d’efforts sont faits par les ministères de la santé, mais, au-delà de décisions politiques, il faut parfois prendre des décisions très pragmatiques. Par exemple, il faut que des tests de laboratoires puissent se faire dans le laboratoire le plus proche qui n’est pas forcément dans le pays même. Il serait ainsi plus facile pour les cas dans le nord de la Sierra Leone que les tests soient faits à Gueckédou, dans le sud de la Guinée. Les États se mobilisent, mais ils ont parfois des difficultés à prendre des décisions pragmatiques.
 
Un autre problème est que cette pathologie fait très peur. L’épidémie se poursuit, car la population ne fait pas suffisamment confiance aux structures et continue de cacher des malades. Il est très important que les autorités administratives ou traditionnelles continuent de faire passer le message qu’Ebola est toujours là et qu’il faut rester mobiliser pour arrêter cette épidémie. Il faut que la population comprenne que sans sa contribution nous n’y arriverons pas.
 
Est-ce qu’un contrôle des mouvements de populations comme l’envisagent la Guinée, la Sierra Leone et le Liberia vous semble réalisable ?
 
Je comprends que les autorités réfléchissent à des mesures pour empêcher les gens de bouger, mais je crains que cela ne soit impossible à mettre à l’œuvre, car les gens circulent beaucoup et peuvent emprunter de nombreuses voies non contrôlées. Il n’y a pas que les routes principales. Il est en revanche important d’expliquer aux gens qui sont sur la liste des personnes entrées en contact avec des malades qu’ils doivent se signaler quand ils bougent et qu’ils puissent être suivis dans un autre village pour voir s’ils présentent des symptômes. Pour arrêter la contamination, les deux piliers sont le suivi de ceux qui sont entrés en contact avec les malades pour qu’ils n’infectent pas d’autres personnes et l’encadrement des funérailles pour que les gens ne repartent pas chez eux infectés par Ebola. Cela est fait aujourd’hui, mais pas de manière assez rigoureuse.
 
Faut-il craindre une propagation à grande échelle du virus en Afrique de l’Ouest ?
 
Au début de l’épidémie mi-mars, le risque était très minime, mais aujourd’hui celui-ci grandit. L’épidémie s’étend, car les gens continuent de bouger dans d’autres pays de la région. Il faut une mobilisation exceptionnelle de tous les acteurs pour que l’on puisse l’arrêter au plus vite. On a tous cru que l’épidémie était terminée, mais elle est repartie et il faut aujourd’hui remobiliser tout le monde et que la population accepte les mesures qu’on lui demande de prendre.
 
Les cas d’Ebola étaient jusque-là recensés en Afrique centrale, connaît-on désormais les origines du virus apparu en Guinée ?
 
La souche est Ebola-Zaïre qui a subi une légère mutation, mais on ne sait pas encore comment elle est arrivée jusque-là.

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